Portrait : Les Monstres, le studio d’animation au talent monstrueux

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Derrière la Mairie du Xe et à quelques mètres du conservatoire Hector Berlioz se cache l’une des entreprises parisiennes les plus innovantes en matière d’animation. L’occasion d’en savoir plus en partant à la rencontre de Nicolas Mongin et de son équipe, qui n’a de monstrueux que le talent.

 

Michel Lagarde : Quand avez-vous créé cette société et quel est le désir impérieux qui vous anime en tant que chef d’entreprise ?

Nicolas Mongin : Thomas Benazech et moi on s’est rencontrés en agence et c’est en 2009 qu’on a décidé de créer Les Monstres, un studio créatif, un creuset dans lequel on pourrait expérimenter des choses. L’idée c’est qu’on voulait revenir aux sources, au graphisme, comme base forte de notre direction artistique. On voulait redonner du sens à ce que l’on faisait. En agence, on ne faisait que répondre aux demandes client sans qu’il y ait un véritable sens aux esthétiques qu’on développait.

Finalement on venait juste combler des vides. Il n’y avait plus de corrélation entre les mots et les images. Aujourd’hui quand on dit graphisme, on pense print et livre. Mais le graphisme est partout, dans la couleur des chaussettes que tu choisis le matin jusqu’à la tasse dans laquelle on boit son café. Tout cela a un sens dans la vie de chacun, et il nous paraissait essentiel d’y revenir. Notre première envie c’était donc de revenir au graphisme, de fabriquer et d’expérimenter des choses. Prendre le temps, ne pas se presser. Les Monstres, c’est un studio de création. La création ça prend du temps !

“On a pensé Les Monstres comme un studio à l’ancienne, un vrai endroit, où des gens d’horizons divers peuvent se croiser.”

Des graphistes, évidemment, mais pas seulement. Chez nous on croise des performers, des plasticiens, des musiciens, des réalisateurs, des techniciens, des animateurs, des codeurs, des coiffeurs. Le studio est un lieu de vie, c’est pour ça que la première chose qu’on y a construit, c’est une cuisine. C’est là qu’on reçoit nos clients, nos partenaires et nos amis ! Un studio de création comme Les Monstres c’est aussi une entreprise avec des clients, des salariés, des fournisseurs, des comptables et des charges.

Être créatif n’empêche pas d’être rationnel. Et inversement. Notre conception de la gestion de l’entreprise est très raisonnée. C’est la construction d’une relation commerciale saine avec nos clients, et une gestion réfléchie qui nous permet de faire vivre le studio et d’avancer. On respecte et on aime les marques et les artistes pour lesquels on travaille. Quand on accepte un projet c’est qu’il nous enthousiasme, qu’il nous donne envie de réfléchir, de trouver des choses, de faire des propositions.

L’idée de l’entreprise Les Monstres aujourd’hui, c’est de ne pas devenir trop gros, c’est à dire qu’au delà de 50 personnes, on ne sait pas si on pourra fonctionner de la même façon. Aujourd’hui le studio est créatif, parce que le salarié n’est pas une compétence interchangeable. Chaque personne qui vient travailler avec nous, on la connaît, on l’a choisie, et on aime ce qu’elle fait. Les Monstres c’est une veille permanente, on cherche et on apprend tous les jours.

 

ML : Pouvez-vous nous parler du cœur de votre activité commerciale et de votre projet professionnel le plus cher ?

NM : Chez Les Monstres, on a 2 sortes de clients : les chaînes et les marques. On est beaucoup sollicités par les chaînes pour notre expertise en animation. Il faut dire qu’on a passé notre baptême du feu avec la série produite pour Arte “Les Grands Mythes”. Il a fallu qu’on produise 120 minutes d’animation 2D tradi en 12 mois. Du coup on a vraiment développé ce pôle d’animation 2D et 3D. On travaille beaucoup avec les réalisateurs de documentaires. Et en ce moment on développe 3 séries d’animation 2D (adultes et enfants).

Et puis l’autre pôle ce sont les marques. On est de plus en plus sollicités pour réaliser des films en prise de vue réelle ou en animation par des agences ou des annonceurs. On a la chance de ne pas avoir à prospecter, et c’est vraiment intéressant de savoir qu’on vient nous voir parce qu’on nous a trouvés ! Et en général pas seulement pour juste réaliser le film, mais on réfléchit le plus souvent ensemble sur l’image de la marque, ce qu’on peut lui apporter, quelle direction artistique prendre, justement, pour quel film, et quelle en sera l’utilité.

On travaille aussi avec des artistes, beaucoup de musiciens pour lesquels on réalise des clips. On s’entend très bien avec Pan European Recordings et Born Bad Records, deux labels indépendants parisiens. Ce sont des gens qu’on admire beaucoup. Ils ont une vraie vision artistique et ils aiment vraiment ce qu’ils font et les artistes avec lesquels ils travaillent. C’est très inspirant. Et la musique c’est très important pour nous. Pour une marque, ça peut changer un film.

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En général on la fait composer par le studio Shelter, Nicolas Borne et Pierre-Yves Casanova, avec lesquels on adore travailler. Leur studio n’est pas très loin, dans le Village ! Aujourd’hui on utilise toutes les techniques possibles pour raconter une histoire. Nous ne sommes pas spécialisés en anim 2D, en 3D, en stop motion ou en prise de vue réelle. Mais si on a envie d’éprouver une technique particulière, et qu’elle sert notre propos, on va s’entourer des meilleurs ! Nous ne nous refusons rien.

Les anglo-saxons disent que nous sommes un studio “versatile” et c’est hyper positif pour eux. Les agences françaises ont un peu plus de mal avec cette notion, elles aiment bien mettre les artistes dans des cases techniques. Notre projet professionnel le plus cher, eh bien c’est de continuer à développer Les Monstres, continuer à bien travailler, à chercher, à apprendre, faire de nouvelles rencontres. On se place de plus en plus comme producteur. On a envie de développer des talents et des projets.

 

ML : Quelle est la part dictée par l’artistique ou par le commercial chez Les Monstres ?

NM : Pour nous, commercial et artistique sont intimement liés. En fait on pense que l’un ne va pas sans l’autre. On ne peut pas faire de beaux films pour des marques sans être inspirés, et inversement, on ne peut pas produire de projets qui ne soient pas des commandes si on ne sait pas combien ça coûte et où trouver l’argent. Au studio chacun est concerné par les deux pôles. Pour faire des films il faut savoir comment les produire, et ce n’est pas quelque chose qui est enseigné dans les écoles aujourd’hui.

On enseigne même dans les écoles d’art à entretenir une certaine défiance vis-à-vis des producteurs. C’est une erreur. L’ignorance n’est pas créative ! On essaie de faire en sorte que les cloisons soient poreuses entre tous les pôles de production : artistiques, financiers, commerciaux, techniques. Au studio, chacun doit essayer de comprendre ce qu’il se passe sur le poste à côté du sien.

 

ML : Le choix du Xème arrondissement a-t-il été un avantage stratégique ou est-ce d’abord un choix de vie ?

NM : Le Xème, au départ c’est un choix géographique. On est au centre de Paris, à République. Toutes les lignes de métro passent par ici, et on est donc très accessibles. Ensuite, on s’est rendu compte que beaucoup de nos clients habitaient par ici. Et ils sont très contents avant de partir dans leurs grands open spaces à Pantin, Saint-Ouen ou Courbevoie, de venir nous briefer en prenant un petit déjeuner chez nous ! En plus on a des supers commerçants, pour les dîners c’est important. Et puis surtout on est vraiment juste à côté d’Illustrissimo !

 

Les Monstres : 7 Cité Hittorf, 75010 Paris. Tél : 06 82 13 62 47. www.les-monstres.com

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